Dacia passe en mode guerrier

Dacia s’installe définitivement dans la cour des grands avec une identité visuelle conquérante.

Louis Schweitzer aura d’une certaine façon été pour Dacia ce qu’Elon Musk a été pour Tesla. Même si les 2 histoires sont très différentes, les 2 marques ont été gérées comme des start-up, avec deux modèles économiques disruptifs. En tout cas chez Renault, nombreux étaient dubitatifs face à la stratégie low cost imaginée par Louis Schweitzer (PDG de 1992 à 2005), y compris son numéro 2 de l’époque, Carlos Goshn.

Dacia, constructeur automobile roumain, a été racheté par le groupe Renault en 1999 avec une vision claire : développer le savoir-faire et la situation géographique pour commercialiser en Europe de l’Est, alors en pleine reconstruction, la berline tricorps la moins chère du marché. Un objectif que Louis Schweitzer a décidé d’atteindre en cassant les règles : pour la première fois dans l’industrie automobile, le design est réalisé à un coût cible en appliquant la méthode du « design to cost ». Innovante à l’époque, cette méthode renverse la logique de la conception traditionnelle : sans compromis sur la fiabilité et la sécurité, l’optimisation des coûts devient un impératif à chaque étape de la conception du véhicule. Du début à la fin, le prix de vente final est pris en compte dans toutes les contraintes techniques. Dans ce contexte, l’utilisation de pièces et de technologies éprouvées et amorties du groupe Renault a constitué un atout considérable. Du design à la conception puis à la production, les équipes du projet Dacia fonctionnent en interne dans un esprit start-up : une équipe limitée, à partir d’une page blanche, et avec un budget serré.

Et ce qui devait être une marque dédiée aux pays émergents est finalement devenue une marque globale à part entière, venant même marcher sur les plates-bandes de la marque-mère.

Fondé en 1966 en Roumanie, le constructeur automobile Dacia a toujours été lié à Renault. Il est même le fruit d’une coopération entre l’état roumain et le constructeur français, alors encore Régie Nationale des Usines Renault, pour occuper une usine d’équipements aéronautiques surdimensionnée dans le village de Colibasi. Le premier modèle produit, disponible uniquement sur le marché local, était la Renault 8, rebaptisée Dacia 1100 et assemblée à partir de pièces fabriquées en France. On se souvient surtout de la R12 (Dacia 1300). L’histoire de la marque est à lire sur le site du groupe Renault.

C’est finalement en 2004 que la Dacia Logan est dévoilée. Elle révolutionne le marché en rendant une voiture neuve largement abordable. Avec un prix d’achat comparable à celui d’une voiture d’occasion, le succès est tel qu’elle est commercialisée dans toute l’Europe dès 2005. Depuis cette date, la Logan a été vendue à 1,8 millions d’unités, et Dacia a séduit au global 6,5 millions de clients.

Car depuis la gamme s’est élargie : dès 2006 avec le Logan MCV (break), en 2008 avec la Sandero et sa version Stepway à l’esprit SUV, en 2010 avec le Dacia Duster, devenu un best-seller en rendant beaucoup plus accessible le segment des SUV jusqu’alors composé uniquement de modèles haut de gamme, en 2012 avec Lodgy (monospace) et Dokker (monospace et fourgon).

Dacia décline au fil du temps sa philosophie automobile : des voitures essentielles, simples, habitables, fiables et robustes à un prix imbattable.

Même la Spring, citadine 100% électrique lancée en 2021, parvient à respecter ce cahier des charges. Et Dacia est le seul constructeur à proposer des modèles bicarburants (essence/GPL) sur l’ensemble de sa gamme de véhicules particuliers, permettant de réduire la consommation et les émissions de CO2 tout en diminuant les coûts d’utilisation.

C’est sur le concept Bigster qu’est présenté pour la première fois début 2022 la nouvelle identité visuelle de la marque.

Devenue la 5e marque en termes de ventes privées en Europe, Dacia peut viser encore plus grand et se devait d’affirmer son émancipation. Le nouveau logo fait pour le coup véritablement table rase du passé, avec un D et un C stylisés, associés selon un effet miroir, pour former un symbole qui évoque un chromosome ou les maillons d’une chaîne. A l’évidence, un signe de force, de rigidité, de fiabilité. La marque doit être sympa et rester un choix malin, mais elle doit surtout rassurer et revendiquer une certaine rusticité.

Certains observateurs avisés ont remarqué une proximité avec le logo de la DeLorean Motor Company (DMC) et sa mythique DMC12

1968

1978

1991

2000

2003

2010

Ce nouveau logo restera l’héritage du court passage d’Alejandro Mesonero aux commandes du style Dacia. L’Espagnol, appelé par Luca De Meo pour dessiner les prochains modèles, avait quitté Seat fin 2020. Depuis, il est parti chez Alfa Romeo au moment de la réorganisation de Stellantis, mais il aura quand même eu le temps de laisser une trace indélébile chez Dacia.