Victorinox est devenu un véritable symbole du patrimoine Suisse, à l’instar des banques ou du chocolat. Du couteau d’officiers au parfum pour homme, flashback sur une diversification qui pourrait avoir atteint ses limites.
C’est en 1884 que Karl Elsener et sa mère ouvrent un atelier de coutellerie à Ibach, en Suisse allemande, avec deux ambitions en tête : créer de l’emploi dans la région et équiper l’armée Suisse de leurs couteaux multifonctionnels.
Mais Elsener prend très vite conscience qu’avec des produits communs, il ne pourra pas faire face à la concurrence des industriels. Il élabore alors un nouveau concept de couteaux offrant un maximum d’usages dans un format le plus réduit possible. Pour protéger ses lames des contrefaçons, le fondateur fait breveter ses « couteaux d’officiers et de sport » en 1897 et commence à y apposer l’écusson à la croix dès 1909. C’est aussi à la même époque qu’il déposera le nom de marque Victoria en hommage à sa mère défunte. L’entreprise ne sera renommée Victorinox qu’en 1921 suite à l’invention de l’acier inoxydable.
Les soldats de l’armée américaine ramèneront le couteau Suisse aux Etats-Unis après la seconde guerre mondiale, développant ainsi sa notoriété. C’est d’ailleurs eux qui lui donneront le surnom de « Swiss Army Knife », qui finira même par devenir l’appellation officielle dans toutes les régions anglophones. Dès lors, la société va connaitre une croissance continue pendant plus de cinquante ans.
Durant cet essor, la gamme commence à se diversifier avec le lancement de nouveaux couteaux et des premières montres Swiss Army en 1989 aux Etats-Unis. Mais ces années 1990 seront surtout celles de l’internationalisation de la marque (ouverture d’une filiale au Japon en 1992, suivie par le Mexique, le Brésil, la Pologne, la Chine, le Vietnam puis le Chili). L’extension de sa gamme se poursuit aussi en 1999 avec le lancement d’une ligne de bagages ainsi que d’une ligne de vêtements sportswear et professionnels en 2001.
Septembre 2001 sera le mois de l’ouverture du flagship new-yorkais, symbole de cette nouvelle promesse de marque élargie voulue par les héritiers Elsener, Carl en tête, le petit-fils du fondateur. Mais ce sera aussi le mois des attentats du 11 septembre qui conduiront au renforcement drastique des mesures de sécurité dans les aéroports et à la chute des ventes de 30 %. S’ensuivra une période de crise qui conduira la marque à fermer dans un premier temps 15 % de ses points de vente, puis à renforcer ses investissements dans les produits périphériques (montres, vêtements,…) et à reprendre des entreprises comme Swiss Army Brand Inc. en 2002 puis Wenger SA en 2005.
La marque décline ainsi au maximum ses valeurs dans une multiplicité de produits et renforce son « stretching de marque » initié dans les années 1990. Jusqu’à se lancer dans le parfum et oser lancer en 2009 sa première fragrance pour homme. Reste à savoir jusqu’à quel point le marché sera réceptif à ce partage de valeurs, le parfum marquant peut-être une frontière extrême ?
La stratégie s’avère en tout cas globalement payante. En 2009, Victorinox annonçait un chiffre d’affaires de près de 500 millions de francs Suisses. Déjà très présente aux Etats-Unis et dans toute l’Europe, la marque peut aujourd’hui s’appuyer sur un solide réseau de distribution mondial. Victorinox semble décidé à développer le lien affectif fort avec ses clients et à décliner sa signature de marque « companion for life ». En témoigne sa forte activité sur les réseaux sociaux, où elle invite une communauté de plusieurs milliers de fans à partager leurs anecdotes et leur affection pour son produit.
